Moi et les autres ...
Ce soir à la nuit tombée, je m'en vais braver le froid, la bise et l'humidité pour parler, persifler, se moquer avec une amie déçue par l'amour.
SOS discret lancé hier , attrapé au vol dans l'après-midi et la bouée sera donnée en main propre.
Demain matin, de bonne heure, entre mon thé et ma douche, va apparaître à ma porte ma maman qui a perdu sa maman.
Très digne, très forte, l'humour à la bouche, elle va parader.
Mais je le sais, on va parler, persifler, se moquer pour faire sortir au détour d'une phrase, d'une oeillade, un peu de ce ressenti lourd à porter tout seul.
Après demain, en milieu de journée, quand j'en serai à sortir la salade et une tarte à l'oignon vont sonner à mon logis mon père et ma tante. Ma tante qui a perdu aussi sa maman. Mon père qui soutient les deux orphelines depuis une semaine et même plus. Alors entre deux bouchées, deux gorgées, on va parler, persifler, rire et trouver des moments d'intimité pour dévoiler le mal-être de cette génération du dessus qui se retrouve sans génération au delà.
Et moi?
Moi je me bats avec des considérations bassement matérielles.
Je me bats avec mon choix de travailler dans mon chez moi mais de gagner une misère.
Moi, je lutte contre des maux de têtes. Je dompte des vertèbres sauvages.
Angoisses qui se logent dans mon cou, dans mes os, dans mes muscles.
Moi, je feins de ne pas me souvenir de ce rêve avec mon illustre inconnu qui m'embrassait la main, le poignet.
Ce manque de tendresse que je traine comme un sac en désordre qui nous agace mais dont on ne peut se séparer.
Moi ...