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Dans les herbes folles
6 août 2010

Simon, le chat et moi ...

Alors je suis pas là ...
C'est pas grave, j'suis dans mes montagnes.
Je regarde la pluie tomber, je lis, je respire, je me sens toute petite, pas bien grande entre Bionnassay et Miage.
J'ai pas beaucoup de mots qui viennent. Beaucoup d'émotions, beaucoup de choses qui se bousculent mais que je garde pour moi. Pour l'instant.

Alors en attendant d'avoir fait le tri, je vous donne quelque chose.
Quelque chose de précieux. D'intime.
Parce que j'ai bataillé.
Parce que je l'ai d'abord pensé longtemps.
Parce que je l'ai commencé il y a des mois, tellement de mois que ça fait presque des années.
Parce que je l'ai abandonné.
Parce que d'un coup, tout s'est éclairci.

Alors une partie ce soir.
Trois autres qui suivront.


-----------------------
Simon, le chat et moi

J'ai 10 ans.
Je m'appelle Maé.
Simon, le chat et moi, on est inséparable.

Simon, c'est mon voisin. C'est mon meilleur ami.
Il a un an de plus que moi, on a grandi ensemble depuis les couches culottes jusqu'aux pantalons troués.
Simon c'est un gentil.
Il me dépasse d'une tête, tout le monde lui dit qu'il devrait faire du rugby, mais il regarde les gens avec ses grand yeux bruns et il hausse les épaules. Lui, il veut se promener dans la forêt, écouter la lumière du soleil et boire l'air frais de notre campagne.

Le chat, c'est Tripatouille.
On l'a appelé comme ça parce que le soir où je l'ai trouvé, il pleuvait à verse. Simon et moi, on jouait aux cartes sous le porche et j'ai vu cette bestiole toute maigre qui marchait sur trois pattes dans l'allée, trempée jusqu'aux os. Alors forcément, on est allé la chercher. On a ramené le chaton à l'intérieur pour le sécher, le soigner. Il miaulait comme un perdu, il traînait sa patte arrière avec un air misérable.
Au bout d'une coupelle de lait, il miaulait moins, avec un coussin il ronronnait et quand on a fait mine de nous éloigner, il a sauté pour nous suivre en oubliant de boiter.
Quand on lui a fait remarquer, il a brièvement trébuché pour donner le change mais devant nos rires, il a renoncé.
On l'a adopté, on avait pas le choix.
Alors pour nous moquer de notre trois pattes à la noix. On l'a appelé Tripatouille.

Simon, le chat et moi, on vadrouille dans les champs environnants. On s'aventure. On explore. On fait les 400 coups. C'est Tripatouille qui a souvent les meilleures idées mais faut être honnête, on n'est pas en reste pour trouver des choses à faire. Moi, j'ai besoin de bouger. A la maison, il y a rarement du monde, alors je préfère sortir. Être seule dehors c'est moins angoissant que seule dans la grande maison. Je grimpe aux arbres, je dévale les sentiers sur ma bicyclette, Tripatouille dans le sac à dos. Tous les trois, on pique du raisin dans les vignes, on pêche à la rivière, on aide Papi Denis dans son jardin parce qu'on l'aime bien et parce qu'il nous donne des chocolats, on tire la langue à la vieille Fargeton, celle qui noie les chatons et on court se réfugier dans la cahute de la sorcière. Un vieil abri abandonné qu'on a rafistolé comme on a pu.


J'ai 10 ans.
Je m'appelle Simon.

Je vis dans ce village depuis toujours. Mais toujours à 10 ans, c'est à la fois énorme et pas grand chose.
Je passe mes journées dans la nature, marcher dans les bois, sentir la lumière du soleil au printemps, goûter la neige de février.
Et surveiller Maé. Veiller sur elle.

Maé, c'est ma voisine. Je l'ai toujours connu et à 10 ans, connaître quelqu'un depuis toujours, c'est tout un monde.
Maé, c'est ma petite sœur, c'est mon amie, ma meilleurs amie.
Là où je marche, elle court, là où je sens la lumière, elle veut être éblouie, là où j'observe, elle grimpe.
Elle a toujours des idées farfelues et les pires, elle dit que c'est Tripatouille qui les lui a soufflées ...
Je fais semblant de la croire. Elle fait semblant de croire que je la crois.
Et on part dans un éclat de rire.
Alors, je veille sur elle.

On a adopté un chat.
Un roublard, un coquin. Un aventurier.
Il est venu nous apitoyer un soir d'orage, comme dans les contes, en traînant la patte, en jouant le blessé. On l'a nourri, soigné, choyé. Le tricheur ... il a oublié de boiter. Qu'est-ce qu'on pouvait faire, remettre dehors un si bon comédien? Mal nous connaître. Le rire de Maé m'a convaincu et puis ça lui ferait de la compagnie. Maé et Tripatouille, toujours ensemble. Le chat sur l'épaule, dans les jambes, dans le sac à dos.
Elle rentre de l'école et il est là à l'attendre. Mieux que ses parents absents. Occupés. En voyage.

On a une cabane, un refuge pour se protéger du monde, des autres, de nos bêtises. Notre forteresse, où nous fomentons des attaques contre la sorcière qui fait pleurer Maé en noyant les chats, où nous cherchons comment faire sourire Papi Denis et ses chocolats, où nous réfléchissons à nos courses-poursuites en vélos, aux arbres à escalader, aux rivières à goûter.

Maé, le chat et moi, c'est toute une vie. Toute ma vie.


J'suis pas bien vieux.
Je m'appelle Tripatouille.

La première fois que je les ai vus, je me suis dit qu'il fallait que j'en sois. J'étais pas bien lourd, pas bien gros, mais fallait que je trouve une solution pour rentrer dans leur jeux. Alors j'ai joué le tout pour le tout, le chaton perdu, blessé et frigorifié. Ca a super bien marché. Nourri, séché, logé ... mais je me suis laissé aller. M'en ont pas voulu.

Maé, elle est intrépide, elle m'embarque dans toutes ses aventures, sur ses épaules, dans son sac, elle me parle sans cesse peut être pour combler le silence de la grande maison. Elle court dans la lumière, elle pédale dans les descentes, elle crie dans l'eau froide. Elle pleure aussi parfois devant la revêche tueuse de chat. Elle sourit au vieux monsieur du jardin.

Simon, il la surveille comme le lait sur le feu. Il veille sur elle. Peur qu'elle s'embrase. Peur qu'elle se fasse mal. Il sourit parce que lui, il est plutôt calme, il est contemplatif. La forêt, l'eau, la lumière, il se promène au travers. Lui, il me gratte entre les deux oreilles. Il me chuchote des mots sur elle.

Ils m'emmènent parfois dans leur cabanon. Il y a des couvertures, on y est bien pour dormir, pour grignoter. Ils discutent des heures ensemble, me caressent le dos, riant fort ou murmurant.

Maé, Simon et moi, on fait une sacrée équipe.

 

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Commentaires
L
J'adore!!! Toute l'histoire!! ;))
O
Patience ...
S
continue...
Dans les herbes folles
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